Une première semaine contrastée !

Une première semaine contrastée !

La septième journée de course s’achève pour l’ensemble des protagonistes de la 10ème édition de la Transat Québec Saint-Malo. 23 Class40 et 4 grands voiliers réunis dans la Classe Gerry Roufs sont parvenus à s’extirper des pièges du Saint Laurent, des calmes de son golfe et des brouillards de Terre-Neuve. Point d’abandons à déplorer, sauf peut-être celui de l’italienne Claudia Conti, équipière à bord du voilier 100% féminin d’Amélie Grassi (La Boulangère Bio) blessée et évacuée hier matin vers Saint-Pierre et Miquelon. Les marins ont entamé depuis l’autre morceau de bravoure de cette course d’Ouest en Est, les 2 000 milles d’océan Atlantique à parcourir jusqu’à Saint Malo. Et le visage qu’offre en ce début d’été l’Atlantique Nord est tout sauf conventionnel, au point d’imposer aux navigateurs des choix de route drastiquement opposés, et d’offrir aux observateurs l’image d’une flotte éclatée sur près de 400 milles en latitude. Causes de tout ces chambardements, des zones de hautes pressions en évolution sur la route des concurrents, que d’aucuns ont choisi de contourner par le Nord, à l’instar d’Alla Grande Pirelli (Ambrogio Beccaria), grand animateur du début de course et qui prolonge son bord au Nord Est par plus de 49 degrés de latitude Nord. Inversement, nombre de protagonistes, au premier rang desquels Vincent Riou (Pierreval - Fondation Goodplanet) espèrent trouver loin au Sud des vents portants en glissant sous les hautes pressions, cap sur les Açores et la bordure Sud d’une dépression en circulation aux abords de l’archipel Portugais. On le voit, au bout d’une semaine d’efforts, les équipages de la Transat ont radicalement basculé dans cette autre réalité de la course, plus stratégique, faite de paris et de prises de risque sur l’immense échiquier Atlantique.

Deux régates en une !

Cette fois, les jeux semblent faits. A l’exception peut-être de trois des grands voiliers de la classe Gerry Roufs, Uship pour enfants du Mékong (Patrick Isoard), Kriter VIII Lycée maritime (Wilfrid Clerton), El Unicornio (Georges Leblanc) et le seul Class40 Alternative sailing -Construction du Belon (Mathieu Jones), tous les acteurs de la Transat se sont à corps perdus jetés dans leur option de route. Le Nord pour 8 d’entre eux, accompagnés du leader du Groupe Gerry Roufs, le grand VOR 70 Atlas Ocean racing de Gilles Bardot, et le Sud pour 13 autres voiliers emmenés par Amarris (Achille Nebout), tout heureux de reconquérir pour l’occasion son fauteuil de leader. Julia Virat et les filles de Femina Ocean Challenge - Equinoxe ferment la marche à plus de 230 milles, dans une situation météo différente de celle des leaders, et qui lui imposera à n’en pas douter un tout autre choix de route. La Transat Québec Saint-Malo nous offre ainsi, au terme de 7 jours d’une intense bagarre au contact, deux régates en une. Avantage pour l’heure aux Sudistes. Achille Nebout, Fabien Delahaye (Groupe Legallais) et l’autre équipage Normand de Pierre-Louis Attwell (Vogue avec un Crohn) apparaissant en haut des très provisoires classements dans un mouchoir de poche, avec à leur vent Amélie Grassi (La Boulangère Bio) et sous leur vent, Vincent Riou. Côté Nordiste, un casting là encore haut de gamme, dans le sillage d’Ambrogio Beccaria où l’on retrouve en une poignée de milles d’autres cadors de la Class40, Erwann Le Draoulec (Everial), Alberto Bona (IBSA Group), Alberto Riva (Acrobatica), Ian Lipinski (Crédit Mutuel) ou Guillaume Pirouelle (Sogestran-Seafrigo).

Ballotage favorable au Sud….

Ce deuxième dimanche de course est placé sous le signe du ballotage entre les grandes options. La traversée des centres déventés des hautes pressions a coupé le bel élan et les hautes vitesses observés depuis Terre Neuve. La guerre des nerfs est, à n’en point douter, à son paroxysme chez les navigateurs arc-boutés sur leurs fichiers météos. Qui du Nord ou du Sud redémarrera en premier ? Quelle route s’avérera à terme la plus rapide vers l’Europe ? Ce sont là tous les enjeux d’une transat plus indécise que jamais, sur un terrain de jeu Atlantique plus perturbé que jamais, où évoluent à grandes vitesses toutes sortes de systèmes météos qui défient toute logique et mettent aux supplices les navigateurs. Jusqu’au bout, la transat Québec Saint-Malo 2024 va s’écrire à grands fracas de rebondissements et de surprises.

Les mots du large :

Keni Piperol - Captain Alternance

« Enfin en Atlantique! C’est cool ! La vitesse est au rendez vous… »

Erwan Le Draoulec - Everial

« Du soleil, enfin! On est sous spi et ça glisse sous le soleil. Tout va bien. On est à fond… avant la prochaine molle. »

Pierre-Louis Attwell - Vogue avec un Crohn

« On se bat pour remonter les échappés de Terre-Neuve. On a retrouvé hier le soleil et des vitesses élevées. On a fait notre choix de route au Sud. Il y aura du suspens jusqu’au bout, c’est certain !»

William Mathelin-Moreaux - Dékuple

« On a enfin touché du vent hier. On a bien tartiné sous Spi et sous le soleil. On est toujours au contact. La route est longue et il suffit de se battre. Les conditions étaient géniales toute la journée de samedi. »

Des nouvelles de : Femina Océan Challenge

Solène Roland s’est blessée en chutant dans le bateau : elle a pris un coup au coccyx et à une côte.  Après avoir fait le point avec elle, évaluer la douleur, prendre un avis médical et informer la direction de course,  Solène souhaite continuer et se rendre jusqu’au bout.

Outre la douleur il n’y a pas de risque d’empirer la situation si elle continue.  L’équipage a pris la décision de continuer ainsi et reverra donc la façon de travailler à trois afin de diminuer la surcharge des manœuvres et rester sécuritaire jusqu’au bout.

Réflexions du Président de la Class40, Cédric de Kervenoal - Movember

« Cela fait maintenant six jours que nous avons quitté Québec et son ambiance chaleureuse pour arriver à la sortie du golf du Saint-Laurent, en croisant Saint-Pierre-et-Miquelon et les bancs de Terre-Neuve. On nous a tellement dit qu’il fallait faire très attention aux petites, et aux grosses bêtes qui croisaient dans les parages que nous avons été d’une extrême prudence, pour ne pas faire de bobos à  ces grand cétacés pour certains en voie de disparition.

Du coup, nous sommes sortis un peu à la traîne… (joli prétexte pour ne pas dire que nous avons complètement loupé notre sortie du Saint Laurent)

L’ambiance s’est très sérieusement rafraîchie avec les brumes légendaires du coin qui nous ont tout juste permis d’apercevoir le haut des montagnes de Saint-Pierre et de Miquelon.

Il commence à faire froid. Les T-shirts ont laissé place aux sous-vêtements en mérinos et veste polaire dont le nom est parfaitement bien choisi compte-tenu de l’endroit.

Je pense en ce moment à ces pêcheurs que l’on lâchait à la mer sur des doris et qui, à deux par embarcation, bravaient courageusement et à l’aviron cette partie de mer poissonneuse mais souvent plus hostile que les conditions que nous rencontrons.

Ici est un lieu de pêche, mais aussi un cimetière de Marin, appelés les terre-neuvas.

La tour Solidor à Saint-Malo, en a fait un musée, et ayant un lien particulier avec la cité corsaire, passer dans ces parages, n’est pour moi pas anodin.

Nous n’allons pas en pêche pour gagner notre vie, nous sommes ici de notre plein gré pour participer à cette merveilleuse transatlantique quadri annuelle qui célèbre les liens existants entre les deux cités que sont Québec et Saint-Malo, du fait de la découverte de la première par Jacques Cartier, natif de la seconde.

Débouler dans l’Atlantique Nord est une expérience singulière que j’attendais depuis huit ans.

Ce rêve s’accomplit enfin. J’ai vu il y a 40 ans arriver les premiers concurrents de cette course légendaire et je suis heureux et fier de pouvoir mettre mon grain de sable à cette légende.

Au revoir Québec et vivement Saint-Malo. »

Patrick Isoard Uship pour Enfants du Mékong.

« Ambiance un peu triste aujourd’hui à bord. Ce matin à 2 heures d’intervalle nous avons éclatés nos deux derniers Spi. Rappelez-vous juste après le départ nous avions éclaté un spi. Nous n’avons donc plus de spi valide alors que ce seront les voiles qui seront le plus utilisées sur l’Atlantique Nord pour rallier Saint Malo. Nous naviguons sous J1 plus trinquette et tourmentin pour porter le maximum de toile. Notre vitesse est malgré tout plus faible que celles de nos concurrents et notre avance fond comme neige au soleil.

Depuis maintenant plus de 6 heures nous réparons le spi le moins endommagé et le plus récent (2022).  Il est vrai que notre moral en a pris un coup hier matin. Mais nous sommes des battants et nous ne lâchons rien. Nous avons toujours la gagne.

Mon équipage est formidable et là ils donnent tout pour procéder à la réparation. »

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Sourires au Sud, grimaces au Nord

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